La bêta-lecture : quelles instructions donner au bêta-lecteur ?
Bêta-lecture : pourquoi faire relire votre ouvrage, et sur quels aspects doit se concentrer votre bêta-lecteur ou bêta-lectrice ?
Gildas Mergny
4/12/20249 min read
La bêta-lecture : quelles instructions donner au bêta-lecteur ?
Vous y voilà ! Vous y êtes arrivé·e. Après des mois, voire des années de travail, vous avez non seulement fini votre projet d'écriture, mais l'avez également révisé vous-même. Et maintenant ? Tout d'abord, applaudissez-vous bien fort, faites une pause de quelques jours...
On se sent mieux, n'est-ce pas ? Mais vous n'en êtes pas au bout de vos peines. Car pour la prochaine étape de votre épopée littéraire, vous devrez confier votre livre à une tierce personne pour effectuer une bêta-lecture.
Votre bébé est à peine terminé qu'il doit passer sous la loupe experte (ou non) d'une personne de confiance. Ici, l'initiative qui droit primer est d'écouter votre instinct et de confier la deuxième lecture à quelqu'un de bienveillant. Et lorsque cette personne a été choisie, vous pouvez lui donner quelques instructions à prendre en compte lors de la relecture.
Vous pensez peut-être qu'il n'est pas nécessaire de faire relire votre ouvrage, ou que vous savez déjà sur quoi votre bêta-lectrice ou bêta-lecteur devrait se concentrer. Assurez-vous-en en lisant cet article en entier !
Pourquoi soumettre votre manuscrit à une bêta-lecture ?
La première question à laquelle il faut répondre, c'est pourquoi il est si important d'avoir un autre point de vue sur l'histoire que vous avez écrite. Après tout, c'est votre œuvre ! Peut-être faites-vous partie du monde des métiers du livre ? Pourquoi alors auriez-vous besoin d'un second regard ?
On connaît son livre par cœur
Notre cerveau est friand de la catégorisation : la pensée s'organise autour de petites boîtes rangées les unes dans les autres. C'est ce qu'on appelle la pensée catégorielle. Au quotidien, elle peut nous aider à faire le tri dans nos idées, à réduire le stress et à prioriser les actions. Mais dans l'écriture, elle crée un cercle vicieux dont il est difficile de sortir.
Pourquoi ? Parce que votre cerveau range toute votre œuvre dans une seule et même boîte, lorsque vous relisez, vous ne découvrez pas votre roman : vous faites appel au contexte complet que vous connaissez déjà par cœur et qui facilite l'identification d'informations importante, la mise en relation de données et l'attention aux détails pertinents pour l'histoire... Tout ce dont un relecteur n'aura pas et qui lui permettra justement d'avoir un regard nouveau et objectif sur votre écriture.
On ne voit pas ses propres erreurs
Considérez-vous pouvoir reconnaître quand vous avez tort ? Si non, vous ne trouverez pas la réponse à ce problème plus complexe dans cet article. Si oui, vous avez déjà fait la moitié du chemin. En effet, lorsqu'il s'agit d'écriture, il faut savoir admettre qu'on ne pourra identifier seul·e les problèmes aussi bien structurels que rédactionnels de l'histoire.
À cause de la pensée catégorielle, on pourrait relire quarante fois la même erreur qu'elle ne nous sauterait pas aux yeux, puisqu'elle a été incluse au reste du contexte dans notre subconscient. L'objectif est tout de même d'envoyer un manuscrit sans faute d'orthographe/
On veut avoir des premiers retours sur l'histoire
Si vous faites appel à un bêta-lecteur ou une bêta-lectrice, c'est que vous avez déjà en tête de donner sa meilleure version à votre livre. Votre âme d'auteur·e frétille de curiosité à l'idée que quelqu'un d'autre rencontre vos personnages et s'émeuve de l'histoire que vous avez imaginée.
Après tout, écrire, c'est se faire plaisir et espérer faire plaisir à son lectorat ! La première récompense du travail d'écriture arrive pendant la bêta-lecture. On reçoit les éloges si attendus, on fait taire le satané syndrome de l'imposteur dont nous parle si bien Pauline Freiermuth, psycho-praticienne et autrice dans son livre Non au syndrome de l'imposteur ! et on commence à comprendre que tous les efforts n'étaient pas vains.
Bêta-lecteurs et correcteurs professionnels : quelle différence ?
Les définitions des métiers du livre ne font pas toujours l'unanimité. Je ne prétends donc pas clamer la vérité mais plutôt proposer la différence que j'ai moi-même identifiée entre une bêta-lecture et une correction éditoriale professionnelle.
Le rôle d'un bêta-lecteur
Le bêta-lecteur n'est pas forcément un professionnel des métiers du livre. La bêta-lecture de votre ouvrage peut très bien être effectuée par votre mère, votre partenaire, une amie qui vous est chère (c'est souvent le cas pour moi), ou un parfait inconnu. Sa mission est avant tout de fournir les premières impressions sur votre texte en tant que lecteur "lambda".
Il ou elle peut bien entendu corriger quelques fautes d'orthographe, donner son avis sur la structure ou évaluer la cohérence du bouquin ! Mais la valeur de la bêta-lecture réside davantage dans l'impression humaine de votre ouvrage, les émotions qu'il génère, le voyage littéraire qu'il propose.
On retrouve également des lecteurs dits "sensibles". Nos amis canadiens, très avancés en linguistique et écriture inclusive, proposent dans la Vitrine Linguistique la définition suivante du lecteur ou de la lectrice sensible :
"Personne chargée de lire un manuscrit avant sa publication afin d'y déceler des mots ou des contenus pouvant être jugés offensants, inappropriés ou inexacts par certains lecteurs."
Ils n'ont donc nullement besoin d'être professionnels tant qu'ils possèdent une certaine sensibilité aux différents discours.
Le rôle des correcteurs professionnels (ou correctrices professionnelles)
Les correcteur·trice·s pro sont, à l'inverse des bêta-lecteur·trice·s, toujours issu·e·s du monde du livre et connaissent le marché littéraire, la langue française, les tendances éditoriales et les genres sur le bout des doigts. Si vous faites appel à l'un ou l'une d'entre eux, c'est dans le but de préparer votre bouquin à une publication future, ou à l'envoi de votre manuscrit à une maison d'édition sérieuse, de préférence sans faute d'orthographe ni problème de syntaxe.
En plus des problèmes structurels et éditoriaux ayant trait à l'histoire, la correction de manuscrit indique les soucis de longueur, de syntaxe, d'orthographe, de grammaire, de tournure, une analyse du texte chapitre par chapitre et un résumé argumenté du texte. Les correcteurs peuvent vous donner de très bons conseils d'écriture et assurer que votre manuscrit sera envoyé à un éditeur sans faute d'orthographe, à l'exception sans doute de quelques coquilles qui ne rentreront pas dans le processus de décision du comité de lecture.
Il est bien entendu essentiel que le correcteur, tout comme le bêta-lecteur, fasse preuve de bienveillance et ajoute des commentaires aussi bien constructifs qu'encourageants.
Encre pensive, alias Barbara, est autrice éditée et correctrice certifiée. Pour elle, les bêta-lecteurs et les correcteurs professionnels peuvent intervenir sur le même texte, mais à des étapes différentes.
"Pour grossir le trait, on dit que la bêta-lecture est là pour le fond tandis que la correction est là pour la forme ; c’est pourquoi elles vont de pair", commente-t-elle. "Comme l’a judicieusement précisé Gildas, le ou la correcteur•ice intervient à la dernière étape de votre manuscrit, lorsque vous êtes près de le publier. J’entends par là que votre roman est à sa version finale – ou du moins, à une version que vous jugez comme telle."
Barbara soutient donc que la bêta-lecture se ferait en amont d'une correction éditoriale, et permettrait de dégrossir le travail de fond. Si vous avez terminé votre étape de bêta-lecture, n'hésitez pas à lui demander de l'aide pour une correction éditoriale !
Une question de coût
Bien qu'il existe quelques bêta-lecteurs rémunérés, il est tout de même plus courant que la bêta-lecture soit faite bénévolement. Comme expliqué, les bêta-lecteurs et bêta-lectrices ne sont pas nécessairement des professionnels du monde du livre et peuvent proposer davantage une analyse globale et amatrice de l'œuvre.
J'effectue moi-même des bêta-lectures fréquemment pour des ami·e·s auteur·e·s et bien que je sois également professionnel de la rédaction et de la traduction, je ne prétends pas être un expert de la correction éditoriale qui justifierait d'être payé au même prix qu'un correcteur ou qu'une correctrice professionnelle. Réviser des textes destinés au web est bien différent d'une relecture éditoriale qui a pour but de séduire une maison d'édition ! Même si je reste un auteur formé à l'écriture de fiction, je pense avoir encore un petit bout de chemin à faire avant de me revendiquer correcteur.
Voilà pourquoi la correction de manuscrit par des professionnel·le·s doit être rémunérée, alors que la bêta-lecture se fait, de manière générale, gratuitement.
Proposition de méthode d'une bêta-lecture
Comme expliqué plus haut, j'ai l'habitude d'effectuer des bêta-lectures pour des ami·e·s ou des membres de ma communauté littéraire. J'ai suivi un master en traduction et rédaction et une formation d'écriture créative. J'ai également écrit plusieurs textes, entre romans, nouvelles, pièces de théâtre et miniséries, ce qui a aiguisé mon œil (parfois par les échecs) à différents aspects d'une bonne bêta-lecture, selon moi.
Lorsque vous envoyez votre texte à votre bêta-lecteur, vous pouvez lui demander de faire attention aux éléments suivants.
La structure narrative
Mon histoire suit-elle un rythme cohérent ?
Le lecteur peut-il identifier à tout moment la direction du livre (mon lecteur est-il parfois perdu) ?
La pyramide des émotions et la divulgation d'informations sont-elles bien gérées ?
Y a-t-il des longueurs et des sous-intrigues peu utiles ?
Le respect du genre et du public
Mon livre suit-il les codes du genre dans lequel je l'ai placé ?
L'histoire et le style sont-ils adaptés au public que je souhaite viser ?
La cohérence
Les décisions des personnages s'alignent-elles avec les événements du livre, les informations disponibles et les différentes personnalités ?
Les actions sont-elles vraisemblables et logiques dans l'univers que j'ai établi ?
Y a-t-il des détails incohérents en termes de description physique, passé d'un personnage ou véracité d'historique ?
La rédaction
Le style est-il fluide ?
Y a-t-il des répétitions ou l'utilisation intempestive de verbes faibles (comme "être", "dire", "avoir", "faire")
Est-ce un texte avec des fautes trop fréquentes (+ bonus si votre bêta (ou BL) est un·e as de l'orthographe)
Les descriptions sont-elles trop lourdes, trop figées ou trop rapides ?
La bêta-lecture est une étape cruciale de l'écriture d'un livre. Elle vous permettra de recueillir les premiers retours tant attendus sur votre œuvre et une idée globale de l'effet de votre roman sur les lecteurs et lectrices lambda, bien qu'il existe des bêta-lecteurs rémunérés. Pour plus de bénéfices, vous pouvez faire appel aux services d'un·e correcteur ou correctrice professionnel·le et convenir d'un budget pour préparer votre texte à une soumission en maison d'édition sérieuse. Le choix vous appartient ! Tout comme votre livre.
"La bêta-lecture est là pour le fond tandis que la correction est là pour la forme"
Encre pensive, autrice éditée et correctrice certifiée
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